Thank you Samantha Deman of Arthebdomedia for the interview!

Entre contrôle et lâcher-prise avec Tal Waldman

Née près de Tel Aviv, Tal Waldman a suivi un cursus en beaux-arts et en architecture en Israël, puis en Allemagne et en France, où elle s’est installée à Paris en 1996. Des études ponctuées de nombreux voyages – à travers le continent australien, en Asie et en Europe – et rencontres qui continuent de nourrir sa pratique comme son inspiration. Se jouant des frontières, sa démarche se situe à la croisée des arts, du design et de l’architecture. Après avoir mené plusieurs projets expérimentaux et collaboratifs aux côtés d’artisans d’art – l’un d’eux, Mémoires brodées (2011-2016), incluait aussi la participation d’une journaliste et d’un photographe –, l’artiste développe depuis quelque temps une recherche plus intime, recentrée sur le dessin et questionnant notamment la place du hasard et du subconscient en tant qu’outils créatifs. Fruit de ce nouveau travail exploratoire, sa série Hasard Dirigé sera exposée du 6 au 30 novembre à la galerie L’entrée des artistes, à Paris. Pour l’occasion Tal Waldman a accepté de se livrer au Jeu des mots.

Enfance

« Je me souviens de longs moments passés seule, à lire dans ma cabane perchée dans un arbre, à étudier les plantes et à apprendre à les dessiner, à écouter de la musique, assise dans la même position que mon chien, en regardant les vinyles tourner. C’étaient des moments intenses de silence, d’exploration et de concentration. Je me souviens d’une phrase de Proust qui disait quelque chose comme “tu ne vivras plus jamais rien d’aussi intense que ces après-midis que tu passais à lire dans ton enfance”… Je suppose que créer, c’est rechercher ce silence et ce goût des choses propres à l’enfance. »

Woman, Tal Waldman.

Dessin

« Pour moi, dessiner est aussi naturel et automatique qu’écrire ou parler. J’ai commencé à dessiner très jeune et j’ai ensuite par ce biais exploré plus avant la nature, sur un mode figuratif, la gestuelle corporelle et, plus largement, les arts graphiques. Plus tard, j’ai eu l’occasion d’étudier le dessin miniature en Inde, ainsi que le dessin technique lors de mes études, puis de mon travail, en design et en architecture. Aujourd’hui, j’explore le dessin en tant qu’outil pour tenter d’accéder à mes rêves et à mon subconscient. J’ai pour cela développé des techniques qui m’aident à faire usage de l’aleatoricism, terme anglais qui signifie incorporer une dose de hasard dans la création. C’est un peu comme la technique du frottage créée par Max Ernst. Cela permet ainsi à l’invisible, à l’onirisme, au symbolique d’entrer dans mon travail. »

Hasard

Interconnectivity P, Tal Waldman.

« Cela veut dire beaucoup de choses pour moi. C’est une notion qui peut renvoyer à la raison pour laquelle je vis en France et pas ailleurs, par exemple : j’ai une histoire de vie qui m’a fait voyager d’un endroit à l’autre, jusqu’à ce que je décide de m’arrêter là, à Paris, car je suis tombée amoureuse de la ville et d’un homme. Ou quand le hasard rejoint le destin. Dans mon travail, comme dans d’autres, il existe par ailleurs un langage plus intuitif, où le hasard joue un rôle important. J’aime faire le parallèle avec la calligraphie pratiquée par certains maîtres asiatiques, qui allie méditation et gestuelle corporelle. Pour ma part, je m’intéresse beaucoup aux notions de conscience et d’inconscience ; une certaine compréhension du moi, du soi, m’est essentielle. Notamment dans le travail que je développe depuis deux ans à travers une série onirique de dessins intitulée Hasard Dirigé, où j’explore le subconscient en tant qu’outil créatif, dans un va-et-vient constant entre contrôle et lâcher-prise. Je m’intéresse à cet équilibre délicat entre hasard total – il n’est pas question de chance, ce n’est pas mesuré –, lié à une action corporelle et à mon état d’esprit, et réflexion artistique, une forme usuelle de jugement, quelque chose de plus intellectuel et de plus contrôlé. Cela produit une série de dessins très organiques, évoquant quasiment l’univers cellulaire, donc intérieur. » »

Geste

« C’est un outil. Il est très important à mes yeux, car je suis très liée à mon corps. J’aime la danse, l’expression physique. Chez un artiste, le geste est selon moi une expression complètement intérieure, consciente ou pas, mais qui fait partie de son travail. Pour certains créateurs, le geste se confond même avec leur travail. Moi, je me suis trouvée sur cet axe, le geste est associé au corps entier. La ligne est une extension du geste. Beaucoup de mes dessins sont “construits” à partir de lignes ; ils traduisent visuellement mon langage corporel à travers les sujets évoqués ou les textures utilisées. Le papier participe quant à lui à rendre les gestes visibles, voire tactiles. »
Civilisation Remains, Tal Waldman.

Couleur

« Les vitesses variables de la lumière contiennent toutes les splendeurs de l’univers. La couleur est par conséquent l’une des manifestations de la vibration qui affecte notre corps comme nos émotions. La couleur est la somme de la matérialité, de la texture et de la relation entre les couleurs elles-mêmes. C’est aussi une question d’équilibre, entre l’abondance et l’absence de couleur. Les couleurs sont très présentes dans ma vie et même si je suis consciente de l’effet de celles-ci sur moi ou que je suis attentive à celles que j’adopte en fonction de mon état d’esprit, mon utilisation des couleurs reste intuitive. »

Voyage

« Cela m’évoque d’abord la mémoire et l’identité. C’est l’histoire d’une migration, la mienne et celle de ma famille, depuis et vers l’Europe. Le voyage renvoie aussi au mouvement et au changement constants, il favorise de nouvelles expériences, la découverte de sons, de goûts, d’idées, de couleurs et d’images, le tout générant ainsi une forme de renouveau. Enfin, il peut être plus intérieur, et signifier un changement d’esprit. »

Liberté

Women Dream, Tal Waldman.

« La notion de liberté est présente dans le sens premier donné à mon travail, dans le concept, le support, le geste, la technique et le matériau utilisés. Elle est aussi liée à la façon dont je décide de le percevoir. J’estime que cela commence par une compréhension plus profonde de soi, que ça nécessite de mener activement une quête intérieure. Ce n’est qu’à partir de là que je pourrai parler d’une impulsion de liberté dans mon travail. J’ai étudié et pratiqué l’architecture et le design, ainsi que les beaux-arts. Cette interdisciplinarité est essentielle et participe à ma liberté. Et je tiens à rester libre de mes choix en termes de thème, de volume ou de technique, d’aller absolument là où j’ai envie. S’il prend source auprès de techniques traditionnelles, le travail que j’ai développé ces dernières années intègre le textile, le bois, le verre, la broderie, la céramique, le papier, l’acrylique, la résine, la porcelaine, le recyclage ou encore le numérique, ce qui me permet d’expérimenter des hybridations de matériaux et de techniques. En ce qui concerne plus particulièrement le dessin, mon besoin de liberté se voit satisfait par le processus expérimental évoqué plus haut, qui comprend des gestes et des techniques que je développe spécifiquement. Bien que risquée, mais si excitante, je n’aime rien tant que l’exploration poussée à son paroxysme, dénuée de tout préjugé, donc libre. »

 

 

 

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Merci à Samantha Deman de ArtHebdoMedia!

 

 

 

« Cette série onirique de dessins de petits et moyens formats explore la relation entre le chaos et l’ordre, mettant en évidence un processus de “hasard dirigé” dans mes gestes, entre contrôle et lâcher-prise. Un mouvement qui questionne la place du hasard et du subconscient comme outil de création. Le dessin final est tissé à la fois d’actions subconscientes imprévisibles et d’actions contrôlées dans un ordre nouveau avec de possibles nouvelles relations entre les deux forces. Inspirées par la dimension spirituelle du déterminisme, de la calligraphie kinesthésique et de l’art stochastique, les frontières entre le sacré et le profane sont explorées à l’aide d’un langage intuitif et symbolique. L’utilisation de l’or se réfère aux arts sacrés de l’illumination et mes études passées de la peinture miniature en Inde. » Tal Waldman. Visuel : Power (série Hasards dirigés), Tal Waldman, 2018.
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LIEN COMMUNIQUÉ DE PRESSE : DP-HasardDirige-VC

Le hasard existe t-il ? Comme dans un rêve dans lequel ordre et chaos s’enlacent, Tal Waldman explore dans cette exposition de dessins ces entrelacs, mettant en avant le processus de « hasard dirigé »qui questionne la place du hasard et du subconscient en tant qu’outil créatif. Le hasard comme point de départ formel de l’expérimentation des réactions entre couleurs, pigments et l’eau pour chercher ensuite la conscience sur le rythme de séchage de l’eau avec une technique de séchage innovante devenant outil de dessin dans la composition finale. Un peu à la manière du frottage créé par Max Ernst, Tal Waldman développe dans son travail du dessin des techniques lui permettant d’accéder à l’aléatoire pour atteindre l’onirisme dans sa création.
 Le dessin final est constitué à la fois d’actions subconscientes imprévisibles et d’activités contrôlées dans un nouvel ordre, avec de nouvelles relations possibles entre les deux forces.
 Tal Waldman œuvre avec sensibilité et poésie, son langage intuitif et symbolique s’inspire du déterminisme, de la calligraphie kinesthésique et de l’art stochastique.  Entre sacré et profane, ses dessins interrogent l’origine, la nôtre. Dans cette danse d’entrelacs infinis, ils nous invitent à un voyage onirique vers l’acte de créer, entre préparation et hasard, entre ordre et chaos. L’artiste y ajoute, par l’utilisation de l’or en référence aux arts sacrés qu’elle a étudié en Inde, une dimension spirituelle et symbolique. Hasard dirigé,une exposition qui convie a plongé dans notre rapport à l’univers à travers des œuvres intimes et empreintes de mystère. Etes-vous prêt à voyager dans l’imaginaire de Tal Waldman ?
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